Conférence sur la télémédecine

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Le 4 octobre 2018, j’ai eu l’immense plaisir d’être invité par Planète santé pour intervenir aux assises de la médecine romande sur le thème de la télémédecine. Ma conférence traitait en particulier du thème suivant :

Télémédecine : quel cadre juridique pour le médecin ?

Le forum Planète Santé 2018, regroupait de nombreuses conférences, dont une partie destinée uniquement aux professionnels de la santé. La conférence s’inscrivait dans le thème de colloques pratiques, dont l’un consacré à la ‘digitalisation de la profession médicale‘ avec d’autres présentations de professionnels de la santé et d’experts sur la thématique du numérique dans la santé.

Ainsi, j’ai eu le plaisir d’intervenir aux côtés du Dr Jean-Gabriel Jeannot, médecin spécialiste en médecine interne. Le Dr Jeannot est le créateur de nombreux sites en lien avec la santé numérique, comme ses plates-formes Medicalinfo, Medplus.ch, cabinetmedical.ch. Il est aussi connus pour les articles de son blog sur Le Temps en ligne. Son intervention traitait des aspects pratiques de la télémédecine pour les médecins, alors que j’abordais les enjeux juridiques en deuxième partie.

Son article sur la télémédecine regroupe d’ailleurs de nombreuses informations et lien avec ce sujet.

L’objet de mon intervention était de sensibiliser les professionnels de la santé aux enjeux juridiques, parfois méconnus, de la télémédecine, tout en offrant quelques recommandations pratiques.

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QUESTIONS QUE POSENT LA TÉLÉMÉDECINE

La télémédecine est vaste sujet.

Des lignes directrices sur les aspects médicaux, juridiques et éthiques ont été émises par diverses organisations de professionnels, comme aux Etat-Unis avec l’ATA (American Telemedicine Association) et en Europe avec le CPME (Comité Permanent des Médecins Européens) et permettent un premier regard par les professionnels de la santé sur les bonnes pratiques. Mais ces lignes directrices ne sont que le premier pas tout projet de médecine à distance, projet qui peut s’avérer très simple (consultation par téléphone) ou extrêmement complexe. Le domaine de la santé est particulièrement réglementé, et les aspects transnationaux, contractuels, de protection des données de santé et de responsabilité du médecin peuvent s’y ajouter.

Lors de mon intervention, j’ai abordé plusieurs points que l’on peut résumer comme suit :

(1) Actes de télémédecine

Le premier volet a été de présenter les divers actes de télémédecine pratiqués aujourd’hui par les professionnels de la santé et de déterminer quels contrats, enjeux et risques l’on peut identifier pour chacun des différents cas. On distingue quelques principaux actes de télémédecine :

  • téléconsultations, pour les consultations à distance ;
  • téléexpertise, quand il s’avère nécessaire de requérir l’avis d’un médecin expert à distance ;
  • téléassistance, pour les cas où un médecin ne peut pas être sur le lieu de l’examen clinique (pour des questions de distance ou d’urgence) et qu’un tiers non médecin assiste le patient sur place; et de
  • télésurveillance, par exemple dans les cas de biomonitoring des fonctions vitales lorsque le suivi ne requiert pas qu’un médecin ou un professionnel de la santé ne se rende sur place.

(2) Cadre juridique pour le médecin

Le deuxième volet de ma présentation consistait à traiter des divers enjeux juridiques en Suisse pour les médecins et les professionnels de la santé et dans le but de répondre aux questions suivantes :

  • un régime juridique particulier s’applique-t-il ?
  • qui peut pratiquer la télémédecine ?
  • comment gérer la protection des données médicales ?
  • télémédecine et responsabilité : quelle étendue et réduire les risques ?
  • comment les prestations de télémédecine sont-elles remboursées par les caisses maladie ?

(3) Recommandations

En troisième volet, j’ai dressé quelques recommandations pratiques destinées principalement aux professionnels de la santé, mais applicables aux assureurs et aux acteurs de l’innovation (start-ups et hôpitaux).

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LA MÉDECINE A DISTANCE N’EST PAS NOUVELLE. ELLE EST D’AILLEURS EN CROISSANCE

La télémédecine est pratiquée depuis de nombreuses années par les médecins, même s’ils l’on ne s’en rend pas toujours compte. Le système des centrales téléphoniques et des médecins de garde en est l’exemple.

Les premiers actes de télémédecine remontent même au début du XXe siècle avec des essais de consultations à distance par téléphone, plus tard des vidéo-consultations dans le domaine de la psychiatrie. Enfin, 4 jours avant le 11 septembre 2001, c’est l’opération chirurgicale à distance “Lindberg” qui est une réussite, démontrant que la technologie peut apporter des solutions concluantes à distance dans un domaine aussi pointu.

Aujourd’hui, des centres de télémédecine ont vu le jour en Suisse depuis un peu plus de 15 ans, basé sur un modèle d’assureurs pour des solutions comme Medgate et Medi24, principalement pour des actes de téléconsultations. Si d’autres assureurs sont aussi entrés dans la course pour proposer une forme de médecine à distance, on voit d’autres initiatives d’assureurs comme le logiciel myguide de la compagnie d’assurance CSS, service uniquement destiné aux assurés de cette compagnie, mais également des initiatives privées comme “Soignez-moi“. Cette plate-forme de téléconsultations selon un modèle ‘asynchrone‘ proposera de la téléconsultation avec diagnostic et ordonnance à la clef pour CHF 39.-, dans un délai de 60 minutes. En cas de délai plus long, la consultation est gratuite. Une garantie dans l’ère du temps qui incite les médecins de la plate-forme à une certaine performance pour que le modèle économique soit viable.

Du côté des cliniques privées, le Groupe Aevis Victoria est aujourd’hui en forte croissance et s’implique dans la télémédecine avec l’obtention de 40% des participations de MedGate, une augmentation de ses participations dans LifeWatch AG avec une offre publique d’acquisition (OPA) en 2017, spécialiste des outils la médecine à distance et ainsi que l’augmentation de ses participations dans d’autres institutions ou projets dans ce domaine.

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CONCLUSION

On voit bien que si de pareils investissements sont effectués, c’est que la télémédecine peut devenir un réel complément aux examens cliniques effectués sur place traditionnellement par les médecins et qu’il y a de l’argent à faire. Les médecins restent encore timides pour utiliser la télémédecine, probablement pour des raisons de responsabilité ou de méconnaissance des possibilités de remboursement par les caisses maladies, ainsi que par manque de temps.

Vu les initiatives en cours, mais aussi les contraintes réglementaires, politiques et les réticences de certains professionnels de la santé, ce marché reste plein de potentiel. Il va à mon sens croître lentement ces prochaines années, avant de se démocratiser réellement et occuper une place complémentaire à la pratique de la médecine au cabinet du médecin.

Les patients utilisent les moyens de communications électroniques. Ils n’ont que peu de temps ou le prennent pas pour prendre congé pour un rendez-vous médical et préfèrent se soigner seuls. Pour les familles dont les deux parents travaillent. Pour des patients qui changent fréquemment de médecin ou qui n’en ont pas : la télémédecine a tout pour correspondre à une réelle demande. Encore faut-il que le modèle fasse ses preuves, d’un point de vue de la qualité des soins, économique et de coûts de la santé.

Mais peut-être les cabinets médicaux virtuels ne sont-ils pas si loin d’exister…?

Pour aller plus loin :

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Vous entreprenez des projets de télémédecine ? Vous avez des questions juridiques à ce sujet ou souhaitez me rencontrer, vous pouvez prendre rendez-vous directement sur la page santé connectée de notre plate-forme de conseils juridiques datalex.ch.

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